[portrait] Paulette, ou 100 ans d’ode à la joie
Un samedi après-midi, Paulette Barbarin nous reçoit avec Katherine Théron, son amie et voisine, dans sa maison à Cruis.
Tandis que nous sirotons notre café, Paulette, l’œil vif et l’allure coquette, commence à nous conter avec bienveillance le long déroulé des 100 années de la vie intense qui fut la sienne.
Paulette Michel naquit après la Grande Guerre, à Cruis, le 2 novembre 1920, bien sûr à la maison et accompagnée par une sage-femme : « elle n’était pas diplômée, mais elle savait faire, et elle habitait au village ». Drôle de jour pour débarquer sur la terre « le jour des défunts », mais cette date singulière allait peut-être présager de l’immense fidélité et attention de Paulette vis-à-vis des siens, et de sa généalogie tout entière.
Elle était la quatrième d’une famille de cinq enfants, dont malheureusement deux décéderont jeunes : un garçon durant la guerre de 14-18, pendant l’absence du père parti au front du « Chemin des Dames », et plus tard le petit dernier.
Issue d’une famille paysanne, comme de nombreuses familles à cette époque, Paulette se souvient de la présence de quatre générations au village.
Ses parents avaient une ferme avec un élevage de moutons et brebis « au moins 50 », quelques chèvres, des chevaux, le cochon, et des terres à cultiver… Les moutons étaient destinés à la viande. Le lait des brebis et des chèvres servait à la fabrication de quelques fromages pour la famille essentiellement.
Paulette fera toute sa scolarité à Cruis jusqu’au certificat d’études. Malgré les encouragements de l’instituteur, elle ne pourra pas poursuivre car il aurait fallu aller à Sisteron. Le coût des études et la distance ne le permettront pas.
Aussi, très tôt, dès l’âge de 10 ans, Paulette participera aux travaux de la ferme et assumera la cuisine pour la famille. A l’âge de 16 ans, lorsque ses parents ouvriront une boucherie au village, elle tiendra toute seule la boutique et ceci durant 14 années jusqu’en 1950. Cette boucherie était alimentée par la production familiale en cochons, agneaux et moutons, et aussi par l’abattoir de Saint-Etienne-les-Orgues durant la guerre de 1940, ainsi que celui de Sisteron.
Dureté des conditions de vie, l’électricité arrivera à Cruis en 1926, et le réseau d’eau, très tard, en 1954 obligeant d’aller chercher l’eau à la fontaine et bien sûr d’aller au lavoir pour toutes les lessives.
Elle nous raconte la vie dans le village à cette époque, rythmée par la messe du dimanche, lieu de rassemblement avec une église bondée et une assemblée endimanchée, et l’obligation des vêpres l’après-midi. Paulette adorait danser, et les bals dans les villages voisins permettaient aux jeunes gens du canton de se rencontrer.
A cette époque on circulait à bicyclette, mais la famille Michel possédait une jardinière (voiture légère à deux grandes roues) qu’on attelait à un duo composé d’un mulet et d’un cheval. Cet attelage permettait d’aller voir une tante à Ongles et parfois même de pousser jusqu’à Reillanne.
Dans la jeunesse de Paulette, Cruis était très animé car il existait de nombreux commerces : épicerie, mercerie, boulangerie, cordonnier, café, maréchal-ferrant, etc. Il y avait même un cinéma, avec une projection hebdomadaire.
Séjournant parfois chez des cousins à Marseille, elle rencontrera Ludovic, « Ludo », qu’elle épousera en 1950, et de cette union naîtront deux filles, Gisèle et Monique.
Ludo étant lui aussi boucher, ils feront exister plusieurs boucheries dans Marseille et sa banlieue durant 25 ans, en revenant à Cruis seulement pour les vacances. Ils prendront leur retraite en 1975 et resteront à Marseille.
Après le décès de Ludo en 1998, Paulette reviendra en 2000 à Cruis pour retrouver ses racines et vivre dans sa maison natale, route de Montlaux.
De Paulette, à la veille de son centième anniversaire, émanent une vitalité exceptionnelle et une mémoire incroyable.
En plus d’avoir assisté à l’évolution technique et médicale de tout un siècle, elle est aussi le témoin d’une génération qui faisait don de sa vie aux autres, dans une dimension inconditionnelle de service, disponible avec générosité aux générations successives, et en se souciant peu de l’accomplissement personnel.
Paulette savoure maintenant une retraite paisible et bien méritée, entourée de l’affection de sa grande famille (4 petits-enfants et 8 arrière-petits-enfants) elle aime lire sur sa tablette liseuse, jouer au scrabble, faire des mots croisés, aller faire ses courses, se promener, et aussi admirer les arbres.
Nous souhaitons un magnifique rendez-vous d’anniversaire à Paulette, sous le signe de la joie, et de douces et belles années à venir.
Encore un portrait intéressant. Depuis 30 ans que j’habite Cruis, je connaissais Madame Paulette Barbarin de vue mais ignorais tout de son parcours.
Ces portraits apprennent à mieux se connaître et assurent davantage de cohésion dans le village.
Bon anniversaire Paulette de nous deux bel article relatant votre vie nous vous embrassons affectueusement
Émouvant témoignage, heureux anniversaire à Paulette, et merci aux deux reporters.
Un très bon anniversaire à Paulette plein de gros bisous monique ingarao épouse porcella
Je monte a Cruis depuis 1950 et j ai toujours connus Paulette je suis très touchée de se reportage et souhaite un très bon anniversaire pour ses 100ans🎂
Très émue par cet article et l’attention que vous avez porté à notre mère nous va droit au cœur. Mille fois merci à vous 2 .
Bien Cordialement
Bravo !
Le portrait de Paulette justifierait à lui seul le site Cruis citoyen.
Quel bonheur de découvrir mes concitoyens si attachants.
Pour cet anniversaire si symbolique, je souhaite à Paulette joie et longévité .